Le féminisme, ça se lit, ça se vit… mais ça s’écoute aussi. Certaines chansons traversent les générations, d’autres explosent comme des cris de ralliement. Elles nous font danser, réfléchir, parfois pleurer, mais surtout, elles rappellent que la musique peut être une arme douce et puissante à la fois. Voici dix titres féministes, parmi bien d’autres, qui ont marqué l’histoire et continuent d’inspirer, chacun·e à sa manière.
Aretha Franklin – Respect
Impossible de commencer ailleurs. En 1967, Aretha Franklin reprend une chanson d’Otis Redding et en fait un hymne à la dignité et à la reconnaissance. “R-E-S-P-E-C-T, find out what it means to me” : tout est dit. Ce morceau devient le symbole d’une double revendication — celle des femmes et celle de la communauté afro-américaine. Derrière le groove irrésistible, il y a une exigence simple : le respect. Pas la domination, pas la complaisance, juste l’égalité. Aretha, reine absolue de la soul, transforme la demande en déclaration de pouvoir.
Katy Perry – Roar
Sortie en 2013, Roar est un cri de confiance en soi. Katy Perry y raconte la reprise de pouvoir après le silence et la peur. “I got the eye of the tiger, a fighter, dancing through the fire” : difficile de ne pas y sentir le feu intérieur. Ce n’est pas une chanson militante au sens classique, mais un hymne à la résilience et à l’empowerment. En se plaçant du côté de celles et ceux qui se relèvent, Roar fait partie de ces titres qui nous accompagne dans l’affirmation de soi.
Beyoncé – Run the World (Girls)
“Who run the world? Girls.” En 2011, Beyoncé pose la question… et y répond immédiatement. Le morceau, explosif et conquérant, s’appuie sur des percussions et une énergie quasi militaire. Beyoncé n’y prône pas une supériorité féminine, mais la fierté d’être une femme forte dans un monde encore dominé par les hommes. Derrière le show spectaculaire, elle fait passer un message clair : le pouvoir peut être joyeux, collectif, dansant. Une réappropriation du leadership au féminin, sans concession et sans excuse.
Gloria Gaynor – I Will Survive
Sortie en 1978, cette chanson disco est devenue bien plus qu’un tube. C’est un manifeste de survie. “I will survive, oh as long as I know how to love, I know I’ll stay alive.” D’abord chanson de rupture, I Will Survive devient l’un des hymnes les plus repris des luttes féministes et LGBTQ+. Gloria Gaynor, voix puissante et chaleureuse, transforme la douleur en énergie vitale. Peu de chansons traduisent aussi bien ce mélange de rage et d’espoir.
Angèle – Balance ton quoi
“Même si tu parles mal des filles, je sais qu’au fond t’as compris.” chante Angèle dans ce titre sorti en 2019, directement inspiré du mouvement #MeToo. En Belgique comme en France, la chanson bouscule les codes de la pop : texte ironique, clip mordant, ton à la fois doux et percutant. Angèle y dénonce le sexisme ordinaire, le “t’es trop sensible” et le “c’est pour rire”, ces petites phrases qui abîment. En popularisant ces sujets auprès du grand public, elle rend le féminisme plus accessible, plus pop, plus générationnel.
Queen Latifah – U.N.I.T.Y.
En 1993, Queen Latifah, pionnière du rap féminin, sort U.N.I.T.Y. et met les points sur les i. “Who you callin’ a bitch ?” demande-t-elle d’entrée. Le ton est donné. Le morceau dénonce les insultes, le harcèlement de rue, la violence domestique. Latifah, figure respectée du hip-hop, impose une voix posée mais ferme. Elle rappelle que la dignité n’a pas de genre et que la solidarité — unity — est la clé. Ce titre, souvent cité dans les études sur le rap féministe, reste un modèle d’intelligence et de puissance verbale.
Joan Jett – Bad Reputation
“I’m only doin’ good when I’m having fun, and I don’t have to please no one.” Joan Jett, figure du rock punk des années 80, refuse les injonctions à la bienséance. Bad Reputation est une déclaration d’indépendance radicale : pas question de s’excuser d’être soi. Guitares électriques, tempo effréné, voix râpeuse — tout respire la liberté. Joan Jett ouvre la voie à toute une génération de musiciennes rebelles, de Courtney Love à Avril Lavigne, en prouvant que le rock n’est pas réservé aux hommes.
Paris Paloma – Labor
C’est une chanson britannique coup de poing sur la charge mentale et les inégalités de genre. Dans une langue poétique et viscérale, elle dénonce la fatigue invisible des femmes, entre travail, maternité et attentes sociales. Sa voix éthérée transforme la colère en une forme de beauté. Un nouveau cri de ralliement.
Bikini Kill – Double Dare Ya
Le punk féministe de Bikini Kill n’est pas prêt de me lasser. Double Dare Ya, sorti en 1991, est une invitation à l’action : “You’ve got no reason not to fight !” Le ton est brut, frontal, urgent. Kathleen Hanna, figure du mouvement Riot Grrrl, incarne cette rage joyeuse et libératrice. Le morceau ne cherche pas la perfection sonore — il veut provoquer, secouer, réveiller. Avec Double Dare Ya, le féminisme quitte les bibliothèques pour s’emparer des amplis. Et c’est complètement génial.
Le Tigre – Hot Topic
Dans Hot Topic, sorti en 1999, Le Tigre rend hommage à toutes celles et ceux qui ont fait avancer la cause : Angela Davis, Yoko Ono, James Baldwin, Joan Jett… Une véritable liste d’amour et de reconnaissance. Le rythme est électro, les voix scandées, le ton militant. Kathleen Hanna (encore elle) et son groupe célèbrent la mémoire collective du féminisme, dans un style pop et DIY. C’est à la fois un manifeste et une playlist à soi seule — joyeuse, engagée, queer, vivante.
Une playlist, une histoire commune
Ces chansons ne se ressemblent pas, mais elles se répondent. Chacune raconte un combat, une époque, une émotion. Écouter ces voix, c’est comprendre que le féminisme n’est pas une idée figée, mais un mouvement en rythme, porté par des artistes qui osent dire, chanter, hurler parfois, pour qu’on entende enfin.
Et toi, quelles chansons t’ont donné de la force ? Celles qui t’ont fait danser, ou simplement t’ont fait réfléchir ? Parce que le féminisme, c’est aussi ça : une bande-son collective, qui continue de grandir à chaque écoute.